mardi 11 septembre 2012

Soc., 26 juin et 4 juillet 2012 : l'accès par l'employeur aux données placées sur l'ordinateur professionnel d'un salarié



Selon une jurisprudence désormais bien établie, les règes sont les suivantes en matière de consultation par l’employeur de données placées sur l’ordinateur personnel d’un salarié : 


Principe : les fichiers créés par un salarié au moyen d'un outil informatique mis à sa disposition pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel autorisant l'employeur à les consulter librement (Soc., 18 octobre 2006 (clic) et Soc.,16 mai 2007 (clic));

- Limite : l'employeur ne peut, sauf risque ou évènement particulier, consulter hors de la présence du salarié ou sans que celui-ci ait été dûment appelé, les fichiers informatiques que le salarié a identifié comme étant « personnels » (Soc., 17 mai 2005 (clic)  et Soc., 17 juin 2009 (clic)). Ainsi, les salariés ont désormais souvent l’habitude d'intituler certains fichiers placés sur leur ordinateur « personnel » dans l’objectif d'en interdire l'accès à leur employeur. Cette limite permet le respect de la vie privé prévue par l'article L. 1121-1 du Code du travail ("Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché").

Dans un arrêt du 4 juillet 2012, la Cour de cassation devait régler un problème un peu particulier dans la mesure où le dossier intitulé « données personnel » était le disque dur de l’ordinateur, or l’employeur avait consulté l'ordinateur de l'intéressé hors sa présence. Le salarié soutenait que l'ensemble des fichiers contenus sur le disque dur de son ordinateur devait être considéré comme ayant un caractère personnel, alors même que le disque dur était intitulé « Données » au moment où il avait été fourni par l’employeur.

La Cour rejette le pourvoi du salarié en retenant que « si les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, de sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir en dehors de sa présence, sauf s'ils sont identifiés comme étant personnels, la dénomination donnée au disque dur lui-même ne peut conférer un caractère personnel à l'intégralité des données qu'il contient ; que la cour d'appel, qui a retenu que la dénomination "D : /données personnelles“ du disque dur de l'ordinateur du salarié ne pouvait lui permettre d'utiliser celui-ci à des fins purement privées et en interdire ainsi l'accès à l'employeur, en a légitimement déduit que les fichiers litigieux, qui n'étaient pas identifiés comme étant ”privés" selon les préconisations de la charte informatique, pouvaient être régulièrement ouverts par l'employeur».

De même, la chambre sociale considère que « les courriels adressés ou reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoin de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé, sauf s’ils sont identifiés comme personnels. » (Soc., 18 octobre 2011 (clic)).

Or, dans l’espèce à l’origine de l’arrêt rendu le 26 juin 2012, une clause du règlement intérieur de l’entreprise prévoyait que les messageries électroniques des salariés ne pouvaient être consultées par la direction qu’en présence du salarié.

La Cour de cassation décide que «  le règlement intérieur peut toutefois contenir des dispositions restreignant le pouvoir de consultation de l'employeur, en le soumettant à d'autres conditions ». Ainsi, il est possible de prévoir un règlement intérieur qui restreint le pouvoir de consultation de l’employeur.